Ligne Maginot - CASTILLON (CN) - EO8 (Ouvrage d'artillerie)



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CASTILLON (CN) - EO8

( Ouvrage d'artillerie )


L'ouvrage est ouvert au public









Secteur Fortifié
SFAM - SF Alpes-Maritimes

Sous Secteur
Corniches

Quartier
Castillon

Maître d'ouvrage
MIL - CORF

Constructeur
Entreprises civiles

Année
1935

Commune
CASTILLON (06500)

Lieu-dit / Parcelle

Coordonnées
43.836769 - 7.458738

Validité information
Verifié

Niveau de réalisation en 1940
Construit

Etat actuel
Incomplet





Plan sommaire








Notes et informations



ARMEMENT, Artillerie

Bloc 3 :
Le canon de 75mm Mle 1929 de gauche porte le n°23 (marché de 1931), et celui de droite porte le n°48 (marché de 1933).


ARMEMENT, Observation

L'ouvrage disposait de deux organes d'observation: une cloche VDP au bloc 4, et une cloche GFM A-J2 au bloc 5.

A noter l'existence d'un créneau optique au B4 orienté vers l'ouvrage du Barbonnet.


CONSTRUCTION, Cout

Le cout de construction de l'ouvrage à fin 1936 est calculé à 15,56 Millions de Frs de l'époque (12,7 M€ actuels).

Cela se décompose comme suit:
- acquisition terrains : 0,37 MF
- gros-oeuvre : 8,69 MF
- Centrale : 1,13 MF
- second œuvre et réseaux intérieurs : 0,83 MF
- Transmissions : 0,17 MF
- cuirassements, monte-charges et portes : 1,64 MF
- Armements et optiques : 1,36 MF
- Munitions : 1,38 MF

Ceci n'intègre pas les dépenses subséquentes jusqu'à 1940 (aménagements divers, améliorations de détail...)
Source(s) :
SHD - 4V1514 - chiffres compilés par JM Jolas



CONSTRUCTION, Description

L'ouvrage de Castillon est un ouvrage d'artillerie CORF comportant 5 blocs dont un bloc d'entrée auquel se rajoute un bloc cheminée passif destiné à l'évacuation des gaz de l'usine.

L'ouvrage est construit sur deux niveaux séparés de 25 m en altitude, et reliés par un groupe de deux monte-charges. Le premier niveau est celui de l'entrée avec les infrastructures et casernement, le second celui des PC et des magasins des blocs de combat.


Bloc 1 (entrée mixte de plain pied) :
- 3 créneaux FM en extérieur, dans un blockhaus situé à gauche de l'entrée.
A noter que le hall de déchargement est lui-même protégé par 2 créneaux FM, et l'entrée des hommes par un troisième.
Chiffres : terrassement à ciel ouvert : 1830 m3, béton spécial armé : 890 m3

Bloc 3 : Casemate d'artillerie
- 2 canon de 75 mm Mle 1929 flanquant à gauche.
- 2 mortiers de 81 flanquant à gauche
- 3 créneaux FM, un en flanquement de façade, et 2 en protection des arrières de l'ouvrage. Compte tenu des fortes pentes autour du bloc, ces créneaux sont inclinés vers le bas. La margelle du fossé diamant a d'ailleurs du être échancrée pour permettre le tir efficace du créneau de façade.
- 1 cloche GFM A
- 1 cloche LG (non équipée)
- 7 goulottes lance-grenade
Chiffres : puits de 8,6 m, terrassement à ciel ouvert : 2600 m3, béton spécial armé : 2115 m3

Bloc 4 : Casemate d'infanterie et Observatoire
- 1 créneau JM flanquant à gauche
- 1 cloche JM flanquant à gauche (elle aurait du être convertie en cloche pour arme-mixte selon le programme de 1935)
- 1 cloche GFM A
- 1 cloche VDP (indicatif O 34)
- 2 goulottes lance-grenade, une orientée dans le fossé du créneau JM, et l'autre sur la face Ouest du bloc (côté B3)
- 1 tube de communication optique orienté vers le Barbonnet.
Ce bloc n'a pas de créneaux FM de défense des abords, ni d'issue de secours.
Chiffres : puits de 10,4 m, terrassement à ciel ouvert : 1900 m3, béton spécial armé : 1235 m3

Bloc 5 :
- 1 créneau JM flanquant à droite
- 1 cloche GFM A-J2 (indicatif O 35), transformée lors de l'ajournement du B7
- 1 cloche JM frontale, en protection des Avant-Postes.
- 1 créneau FM plongeant, tirant dans le fossé diamant du JM.
- 1 goulotte lance-grenade battant le fossé.
Chiffres : puits de 10,4 m, terrassement à ciel ouvert : 1900 m3, béton spécial armé : 1235 m3

Bloc 6 :
- 2 créneaux de 81, flanquant à droite.
- 1 cloche GFM A
- 2 créneaux FM, un orienté vers le bloc cheminée et l'autre en flanquement de la façade de tir des mortiers.
- 2 goulottes lance-grenade, une dans le fossé et l'autre à l'arrière du bloc côté pente.
Chiffres : puits de 22,3 m, terrassement à ciel ouvert : 2400 m3, béton spécial armé : 956 m3

Les blocs 3 et 6 possèdent une issue de secours en fond de fossé.

Les blocs 2 et 7 ont été ajournés.

Bloc 2 : Casemate d'artillerie flanquement sud (ajourné car la vallée du Careï est amplement battue déjà par le Mt AGEL, l'AGAISEN, le MONTE GROSSO et le BARBONNET)
- 2 mortiers de 75mm Mle 1931
- 1 cloche GFM A

Bloc 7 : Observatoire (ajourné, car sa fonction essentielle était de servir d'observatoire au B2, lui-même ajourné...)
- 1 cloche VDP
- 1 cloche GFM A

Le total réalisé représente 9.830 m3 de terrassements extérieurs, 12.580 m3 de terrassements intérieurs, 4.495 m3 de maçonneries intérieures, 6.520 m3 de béton armé spécial (incluant la cheminée pour 300 m3). Il a été percé 384 m de galeries de communication et pratiquement 80 m de puits (entre étages de l'ouvrage et avec les blocs).
Source(s) :
SHD - 4V1514



CONSTRUCTION, Mission, ou Fonction de l'objet

La mission de l'ouvrage était de barrer le col de Castillon, et d'assurer la continuité de feu d'infanterie et d'artillerie entre Ste AGNES et Le BARBONNET. Accessoirement, il est supposé interdire frontalement les cheminements descendant du Mt Razet.


CONSTRUCTION, Phase ou tranche de construction

Si la construction des blocs 2 et 7 avait été débloquée, il était prévu d'étendre le niveau inférieur avec un grand magasin M1, pour pallier le fait que la route d'approvisionnement de l'ouvrage est pour l'essentiel sous le feu de l'ennemi.


DENOMINATION, Dénominations alternatives

L'ouvrage était aussi connu sous les codes CN et EO8.


DENOMINATION, Indicatifs et n° d'abonné

Les observatoires de l'ouvrage portaient pour l'artillerie les indicatifs suivants:
- Bloc 4 VDP : O 34
- Bloc 5 GFM A-J2 : O 35

Le numéro d'abonné de l'ouvrage au réseau téléphonique de la fortification était E279


EFFECTIF, Commandement et/ou unité

L'effectif de l'ouvrage était de 12 officiers (5 Inf, 6 Art, 1 Génie), 36 sous-officiers et 223 hommes originaires principalement des 76° BAF et 157° RAP.

Cdt de l'ouvrage : Cne FINIDORI Jacques (76° BAF)
Major d'ouvrage : Lt MOLINARI (157° RAP)

Cdt l'infanterie : SLt Marcel RAYNAUD (76° BAF)
Cdt l'artillerie : Cne Henri BARASTON (7°Bie du 157° RAP)

Officier Z : Lt BRETON (76° BAF)
Reserves mobiles : Lt Marius GIRAUD (76° BAF)

SRA : Lt REné MIGNOSI (157° RAP)
PC mortiers de 81 et Cdt Bloc 6 : Lt Victor HEYRIES (157° RAP)
Cdt Bloc 3 : SLt Eugène BINDA (157° RAP)
Cdt Bloc 4 : Lt Robert BREHAUDAT (76e BAF)
Cdt Bloc 5 : Lt Pierre RUY (76e BAF)

Médecin : SLt André BROUTIN (157° RAP)


EQUIPEMENT, Electrique

l'usine électrique était initialement équipée de trois groupes électrogènes à moteurs SIMM type 6 SR19 à 6 cylindres de 150 CV (135 effectif) couplés à un alternateur SW type SAT de 93 kVA et d'un groupe auxiliaire CML 1PJ 65.

L'alimentation de l'ouvrage était assurée en temps normal par le réseau civil via une ligne à l'origine de 5 kV. Cette ligne, détruite durant la guerre, est remplacée en 1955-1956 par une ligne 10 kV qu'on voit encore de nos jours (poteaux métalliques à côté de l'entrée).

L'usine était alimentée par 4 réservoirs de 16.000 litres de gasoil et refroidie à partir de 3 réservoirs d'eau de 32.000 litres. La température de l'eau est maintenue par un aéro-refroidisseur.

Parmi les gros consommateurs "Force", on trouve :
- les deux monte-charges parallèles du puits central de marque Roux-Combaluzier type A de 2,5 tonnes à deux vitesses, mus par des moteurs Alsthom type NP 589 (n° 1.261.214 et 1.261.205) de 17,3/4 CV selon vitesse.
- le monte-charge Roux-Combaluzier du B3 (n° 256), type B de 2,5 tonnes mû par moteur Alsthom NP 589 n° 1.261.209 de 17,4/4 CV de puissance selon vitesse.
- le monte-charge Simplex de 1 tonne mû par moteur AO type EB (n° 138.813)
Source(s) :
SHD - Carnet d'ouvrage du Castillon


Les moteurs d'origine de l'usine électrique portaient les numéros de série suivant :
1 - 535
2 - 534
3 - 533

Le groupe 535 à été déplacé avec son alternateur à l'AGAISEN après guerre. Il ne reste donc que deux groupes d'origine dans l'ouvrage.
Source(s) :
Liste des moteurs mai 1940 - Association Edelweiss



EQUIPEMENT, Hydraulique

L'ouvrage est alimenté par gravité depuis la source Véran sur le plateau de Ségra. Là-haut un réservoir de 200 m3 se vide par gravité dans une canalisation souterraine descendant à l'ouvrage, qui possède 4 cuves totalisant 97.000 litres (3 de 23.000 litres et une de 28.000 litres). L'eau est préalablement traité comme il se doit par décantation et désinfection.

A ceci s'ajoute deux citernes journalières de 5.600 et 2.800 litres, et une de 2.800 litres à la cuisine.


EQUIPEMENT, Mobilier et second œuvre

Literie/couchage :
- 7 lits d'officiers, 16 lits de sous-officiers et 80 lits pour hommes dans le casernement (notons le fort sous-équipement du casernement au regard de l'effectif, qui sera compensé partiellement par des lits dans les blocs).
- B1 : 7 lits pour hommes
- B3 : 1 lit pour homme
- B4 : 1 lit sous-officier et 16 lits pour hommes
- B5 : 5 lits pour hommes
- B6 : 1 lit sous-officier et 8 lits pour hommes
soit au total 117 lits pour hommes.

Cuisine :
Cuisinière au gasoil pour 360 rations.

Points d'eau :
12 robinets dans le local des lavabos
1 poste d'eau au poste de secours et un à l'usine...
Source(s) :
SHD - Carnet d'ouvrage du Castillon (1955)



EQUIPEMENT, Transmissions

Le central principal de l'ouvrage est un central à 96 directions composé de deux panneaux muraux pour 32 abonnés et de deux panneaux muraux pour 16 abonnés desservis par deux tables d'opérateur à 14 circuits.

Un second central est installé au PC artillerie.

L'ouvrage est équipé d'un poste OTCF (Ondes Trés Courtes de Forteresse) le tenant en relation avec les avant postes de la Baisse de Scuvion et de Pierre Pointue

L'ouvrage est relié au réseau téléphonique enterré à la CC du Col de Segra par deux cables 6+14 paires en 1935


EQUIPEMENT, Ventilation

L'ouvrage est équipé "air pur" et "air gazé". Il possède en central deux batteries de 6 filtres dans une salle dédiée, desservant l'entrée, l'usine et le casernement.

Le B3 a sa propre salle de neutralisation avec 6 filtres avec une capacité "air gazé" de 4600 m3/h. Celle des B6, B5 et B4 contiennent 2 filtres (capacité "air gazé" de 1800 m3/h).

La ventilation "air pur" représentant 26.400 m3/h de débit, se fait par tirage direct dans l'entrée avec répartition suivante :
- 5.600 m3/h pour le casernement
- 1.200 m3/h pour B1
- 13.000 m3/h pour les blocs actifs
- 600 m3/h pour le PC/central téléphonique
- 6.000 m3/h pour les tirages d'air vicié usine, cuisine et latrines
auxquels s'ajoute l'air nécessaire à la combustion dans les moteurs.

Le chauffage est assuré par une batterie chauffante sur l'air pulsé du casernement, utilisant l'eau de refroidissement des moteurs. En complément, une dérivation du circuit de refroidissement des moteurs permet d'alimenter des radiateurs en fonte dans les latrines et l'infirmerie. La batterie chauffante et le circuit de radiateurs fonte peuvent compter sur un appoint amené par une chaudière au gasoil.
Enfin, quelques radiateurs électriques de 500 et 1000 W ont été ajoutés dans les PC et l'infirmerie en lien avec l'alimentation par le réseau civil.


GENERALITES, Spécificités

L'ouvrage, construit sur une haute arête étroite, a nécessité un plan particulier de ses locaux souterrains sur deux étages. Il partage cette spécificité avec Gordolon, et bien sur Rimplas (3 niveaux).

Le B3 est un OVNI dans le monde Maginot, car le seul dont les 4 pièces d'artillerie (2 CO 75mm et 2 mortiers de 81mm) ont toutes une orientation différente... (voir section "Construction")

Le B6 est un bloc avec de grands espaces intérieurs et une mezzanine surplombant les mortiers, ce qui en fait un cas à part. Cette inhabituelle portée de dalle a nécessité dés 1936 des études de renforcement par poutrelles et ferraillage interne.


ETAT ACTUEL , Etat - utilisation actuelle

La mairie est aujourd'hui acquéreur de l'ouvrage.

Une équipe de bénévoles passionnés y travaillent régulièrement afin de lui donner une seconde jeunesse et proposer des visites pendant des journées spéciales tel que la journée d'anniversaire de la libération de Castillon qui as lieu chaque année en octobre.

Une association serait en cours de création et verrait le jour début 2024 ! Une très bonne chose !
Source(s) :
Mairie de Castillon - collectif "


L'ouvrage appartient depuis janvier 2024 à l'association "Ouvrage Maginot EO8 Castillon" qui procède à sa restauration.
Des visites sont quelques fois organisées dans l'année.

L'association est joignable par mail: contact@ouvragecastillon.com ou via facebook: https://www.facebook.com/profile.php?id=61555876374552
Source(s) :
association Ouvrage Maginot EO8 Castillon



HISTORIQUE, Chronologie

En 1991, des civils connus pour leur sérieux dans le monde de la fortification créèrent l'association AMICORF. Le premier bureau était constitué de Cima Raymond (président), Fontbonne Rémi (trésorier), Truttmann Michel (secrétaire) et l'objet de l'association était de tenter de sauver l’ouvrage de Castillon en demandant à l’armée de le louer ou de l’acheter.

En 1994, l'ouvrage a été ouvert à l'occasion du 50 ème anniversaire de la libération de Castillon par les troupe américaines provenant d'Italie . Les Anciens libérateurs qui avaient souhaité faire leur "dernier voyage" avant d'être trop vieux ont été chaleureusement accueillis par les autorités civiles et militaires et un public nombreux et la visite du fort fut marquée par une grande émotion.
Les deux ascenseurs n'arrêtaient pas d'aller et venir, alimentés par EDF, mais pour le spectacle et l'ambiance les groupes électrogènes de l'usine tournaient plein régime!

Quelque temps après, l'ouvrage fut mis en vente car l'armée en avait décidé l'abandon. L'association AMICORF se porta acquéreur, mais la commune de Castillon utilisa son droit de préemption pour satisfaire une relation qui entendait mettre la main sur l'ouvrage.

Cette vente fut ensuite annulée lors d'une entrevue à la Préfecture où, après la présentation d'un dossier photographique complet reflétant l'état réel de l'ouvrage, les autorités prirent conscience que celui ci était bien loin de l'état d'épave que l'on leur avait laissé entendre et que cette transaction avait été faussée par des déclarations pour le moins inexactes.

A la suite de cette annulation, le fort fut abandonné durant de nombreuses années durant lesquelles les ferrailleurs se sont régalés.

Quand les intérêts privés priment sur l'intérêt commun ....

les 22 et 23 juin 1940, l'action des cloches des mitrailleuses des blocs 4 et 5 est particulièrement efficace pour la survie des avant-postes encerclés (Pierre Pointue et Baisse de Scuvion)
Source(s) :
Guide de la ligne Maginot des Ardennes au Rhin, dans les Alpes - HOHNADEL Alain - TRUTTMANN Michel Collection 39-45 Magazine, n° Hors série
HOHNADEL Alain - TRUTTMANN Michel - Heimdal - 1988 - ISBN : 978-2902171491 - 96 pages
page 91


L'ouvrage est tenu par les Allemands en 1944 et partiellement réarmé par leurs soins. Lors des combats de libération, les Américains tirent à faible distance sur le bloc d'entrée, qui est gravement endommagé.

L'ouvrage est progressivement remis en état après guerre, à commencer par son usine, l'éclairage et le système de ventilation et d'adduction d'eau. En 1949, un des groupes de l'usine électrique est démonté et transféré à AGAISEN dans le cadre de la remise en service de cet ouvrage prioritaire.

Le bloc d'entrée est rebétonné en 1950, et à l'été 1950 un pont-levis stocké à RESTEFOND en attente de la construction du bloc d'entrée de cet ouvrage est récupéré et installé à CASTILLON en remplacement de celui qui avait été détruit. La ligne électrique d'alimentation par le secteur d'origine (5 kV) est remplacée par une ligne 10 kV neuve en 1956.
Source(s) :
SHD - 4V1806-4V1096



HISTORIQUE, Construction

L'ouvrage mixte de CASTILLON est prévu dans le programme CORF dit "des 362 Millions", approuvé en Janvier 1931. Ses missions principales sont le flanquement du Barbonnet et de la trouée de Sospel vers le Nord, le flanquement du vallon du Careï jusqu'à Ste Agnès vers le Sud. Ses missions secondaires intègrent une interdiction frontale des cheminements descendant du Mt Razet par la baisse de Scuvion et la Pierre-Pointue. Véritable ouvrage de liaison entre les secteurs de barrage de Sospel et Menton, sa construction est néanmoins limitée en 1er cycle à ses organisations d'infanterie (ouvrage dit "intermédiaire") pour entrer dans le budget global.

Ce parti pris est néanmoins modifié au printemps 1931 par arbitrage avec l'ouvrage du BARBONNET : la couverture de la trouée de Sospel étant meilleure à partir du CASTILLON, il est décidé - à budget constant - de priver le BARBONNET de son flanquement d'artillerie Nord, et de construire en conséquence de flanquement d'artillerie Nord du CASTILLON (Note CORF 77/FA). Les deux ouvrages croiseront donc leurs feux, permettant une couverture minimale de l'intervalle Sospel-Ste Agnès.

L'avant-projet 436/F du 23 Juillet 1931, approuvé par DM n° 3 297-2/4 S du 24 Septembre 1931, prévoit un ouvrage à six blocs et une entrée :
- Blocs B et C : flanquement d'artillerie sud (2 x 75mm) et nord respectivement (2 x 75mm et 2 x 81mm). Le bloc B est d'emblée en 2e cycle conformément aux décisions antérieures.
- Bloc D : bloc d'infanterie nord, vers Sospel
- Bloc E : bloc d'infanterie frontal vers les avant-postes
- Bloc F : bloc pour mortiers de 81mm vers le Sud.
- Bloc G : Observatoire Sud et défense périphérique d'infanterie vers le Sud.
Le projet prévoit en outre un considérable M1 à l'étage inférieur - justifié par l'exposition de la route d'accès -, avec boucle souterraine de desserte en circuit ouvert, et un casernement de grande dimension. L'écart d'altitude entre les niveaux de l'entrée et des blocs justifie la création d'un étage intermédiaire pour les M2, à mi-distance entre les deux.
L'avant-projet est chiffré à 14,05 MF dépassant le budget prévisionnel (12 MF) alloué à l'ouvrage. En conséquence, le bloc G, le M1 et une partie du casernement sont ajournés d'emblée en 2e cycle. Le commandement suggère aussi de retirer les mortiers "Nord" du bloc C pour les joindre au bloc F, déjà armé de ce type de pièces vers le Sud. L'objectif est de rationnaliser le stockage des munitions et de simplifier ces locaux.

Le marché de construction du gros-œuvre de l'ouvrage est passé à la société BORIE de Paris le 28 Septembre 1931, pour un montant total de 7,7 MF. Ce même marché intègre la construction de l'ouvrage de SAINTE AGNES (7,5 MF), de l'ouvrage intermédiaire de la COTE 902 (3,2 MF) et du petit ouvrage du VALLON de GORBIO (1,1 MF), ces deux derniers étant finalement ajournés. Ce même marché intègre la construction de l'abri du COL des BANQUETTES (1,1 MF) et l'observatoire CORF du MONT OURS (1,3 MF - ajourné).

Un temps envisagé suite à un commentaire du général Birchler (Inspecteur technique des travaux de fortification), le regroupement des 4 mortiers de 81mm dans le bloc F est étudié par la DTF de Nice et abandonné en Février 1932 car occasionnant un surcout notable et rendant le bloc F trop important et vulnérable.

Sous la pression de l'entreprise BORIE, qui voudrait démarrer le chantier fin Janvier et demande ce qu'il y a à faire, la DTF de Nice est contrainte de proposer en avance dés le 19 Février 1932 un projet spécifique des organisations souterraines de l'ouvrage tenant compte des commentaires faits précédemment, et cela avant que le projet technique complet et amendé de l'ouvrage soit finalisé. Ce projet partiel "pour pouvoir démarrer" est approuvé et permet de lancer les travaux sur le terrain. Cette façon de faire - inhabituelle dans les projets sud-est - est risquée en termes de gestion de projet car expose le chantier à des remises en cause après démarrage. Elle est cependant saluée par le Gal BIRCHLER (Inspection Technique des Travaux de Fortification - ITTF) qui voit là une amélioration en termes d'efficacité. Quelques commentaires de détail visant à des économies sont fait sur ce projet, qui est approuvé le 24 Mars 1932 (DM 1241 2/4-S).

En janvier 1932 une nouvelle estimation du cout, incluant des dépenses sous-évaluées initialement comme celles du réseau barbelé périphérique compensées par un rabais important(-27% !) négocié sur le marché de gros-œuvre, ressort à 13,2 MF pour un crédit qui de son côté a été escalé à 14 MF par arbitrage sur d'autres dépenses. Ceci permet d'envisager la réintroduction du bloc G (B7) dans le projet technique final de l'ouvrage qui est présenté le 3 Mars 1932 (dossier 211/F). Ce retour du bloc G (B7) - estimé à 1 MF - se justifie essentiellement par le fait que c'est le seul bloc permettant une défense d'infanterie adéquate des approches Sud de l'ouvrage. Il est donc considéré comme essentiel par l'ITTF et le secrétariat Sud-Est de la CORF.

Ce projet technique final est proche de ce qu'on connait de nos jours. Quelques particularités méritent d'être notées et permettent de comprendre des spécificités de l'ouvrage :
- 1/3 de l'effectif de l'ouvrage est logé directement - et de façon spartiate… - dans les blocs de combat ou dans leur voisinage immédiat du fait du dénivelé important entre le casernement et ceux-ci. Cela permet une économie substantielle sur le casernement et d'avoir un équipage minimal à portée d'armes.
- le deux canons obusiers et mortiers de droite du bloc C sont désaxés de 6,5 grades par rapport à ceux de gauche pour permettre la couverture à la fois des cols de Pérus et Brouis à droite et de la montée vers le Barbonnet à gauche (disposition relativement classique dans les Alpes).
- les deux armes de mission frontale (jumelage "Baisse de Scuvion" au bloc D et jumelage "Pierre-Pointue" au bloc E) sont sous cloche comme il se doit pour ce type de configuration.
- A ce stade, deux cloches LG sont prévues, l'une sur le bloc C (B3) et l'autre sur le bloc F (B6). Une 3e est même prévue dans le bloc B (B2 de flanquement d'artillerie Sud - 2e cycle). Cette profusion de cloches LG se justifie par les nombreux angles morts et accidents de terrain du sommet, impossible à battre par les cloches GFM et créneaux FM de défense périphérique. Une part significative du budget de projet est d'ailleurs dédiée au dérasement des ruines du vieux village de Castillon et l'aménagement des champs de tir.
- les façades arrières des blocs C, D, F sont percées de nombreux créneaux FM permettant - en conjonction avec les cloches GFM - de battre les abords immédiats de l'ouvrage et de ses blocs.
Dans cette logique, le colonel ANDRE - directeur des travaux de fortification de Nice - insiste à nouveau lourdement sur la nécessité de réintroduction du bloc G (B7) pour assurer la continuité de défense proche vers le sud et de défense des dessus du sommet.

Concomitamment à ce projet, une inspection technique effectuée sur site par le Lt-Col TOURNOUX de l'ITTF aboutit à la conclusion après examen des plans et du terrain que le bloc D (B4, flanquement d'infanterie nord et action frontale) gène potentiellement le tir du CO de 75mm de droite (qui a été tourné de 6,5 grades…). Sa proximité de la pente le rend difficile à défiler et interdit la construction d'un fossé diamant devant le créneau JM. La conclusion s'impose : il faut reculer le bloc de quelques mètres et l'insérer davantage dans la colline. Cette proposition est examiné en urgence par les autorités centrales et validée. L'examen du projet technique fourni soulève aussi une question sérieuse avec le bloc F (B6) : la chambre de tir pour les deux mortiers du bloc est une vraie cathédrale, haute de deux étages et avec juste une mezzanine pour accéder à la cloche et au créneau FM. La portée de dalle étant importante, source de fragilité, l'ITTF suggère d'ajouter un mur de refend solide entre les deux mortiers pour soutenir cette dalle.

Suite à l'examen du projet - qui est approuvé le 3 Juin 1932 -, et contre l'avis de tous les experts technique, le général BELHAGUE reste cependant droit dans sa ligne de rigueur budgétaire : puisque le retour du bloc G ferait redépasser le budget il n'est pas question pour lui de le réintroduire tant qu'une preuve des économies et d'un maintien sous la somme allouée n'a pas été fait. Il donne donc rendez-vous en mi-1933 pour restatuer au vu des dépenses réelles.

Les travaux débutent concrètement en Février 1932 et avancent bon train. Le projet technique de chaque bloc est conçu et présenté dans la foulée.

Fin Aout 1932, le chantier de gros-œuvre annonce un avancement de 20%. Les locaux de l'étage inférieur sont percés, sauf l'usine, et ceux de l'étage intermédiaire sont en cours de terrassement. Rien n'est revêtu à ce stade et les fouilles extérieures du bloc d'entrée, et des deux bloc Nord sont bien avancées.

En Avril 1933, l'étage inférieur (Mo 81mm) du bloc C (B3) est coulé. C'est à ce moment que le Génie local décide d'un décalage supplémentaire de 3 grades vers la droite des canon-obusiers de 75mm pour parfaire la couverture du col de Brouis, et cela juste avant la préparation de la coulée de l'étage supérieur du bloc. on en touche pas à la chambre de tir des mortiers, car Brouis est de toute façon hors de portée et leur rôle est plutôt la couverture du Barbonnet. De nouveaux plans sont envoyés in-extremis à la chefferie des travaux de fortification pour que ce décalage puisse être pris en compte dans les travaux de ferraillage en cours. Cela fait du bloc C (B3) une exception sur toute la ligne Maginot : la chambre de tir supérieure est décalée de 3 grades par rapport à la chambre de tir inférieure, et les 2 pièces de chacune de ces chambres de tir sont décalées de 6,5 grades l'une par rapport à l'autre, ce qui en fait un bloc dont les quatre pièces d'artillerie sont toutes orientées différemment !

Quitte à modifier des choses, la Direction des Travaux fournit en même temps à la chefferie des plans du bloc F (B6) eux aussi modifiés pour inclure le mur de refend permettant le supportage correct de la dalle de toiture entre les deux mortiers de 81mm.

Un premier projet technique de ventilation/chauffage de l'ouvrage est établi en septembre 1932, mais rejeté car trop couteux et complexe. L'option consistant à chauffer l'air de ventilation par chaudière séparée est par ailleurs jugé inutile. Un 2e projet est donc réécrit et présenté en septembre 1933, avec batterie chauffante intégrée sur le circuit d'eau de refroidissement des groupes électrogènes.

Les dérives de couts de construction et la mauvaise surprise de la nécessité du rajout d'un sas étanche dans l'entrée tuent au passage définitivement les espoirs de retour du Bloc G (B7).

En Juillet 1934, la question de la protection de l'ouvrage contre les gaz est re-posée, car initialement il n'avait pas été équipé de porte-sas étanche dans l'entrée. Cette décision était basée sur l'évaluation que les gaz de combat, plus lourds que l'air, ne pouvaient l'atteindre. Ce présupposé ayant été jugé finalement optimiste, une solution de rajout d'une porte étanche est étudiée et mais ne sera pas installée comme prévu au fond du garage de déchargement des camions. On se contentera d'améliorer l'étanchéité de la porte blindée de l'entrée et d'équiper l'usine d'une porte étanche.

L'installation des deux canon-obusiers du bloc C (B3) soulève un nouveau problème… La DTF de Nice découvre avec quelqu'embarras que la hauteur de la contrescarpe du fossé diamant a été mal calculée et, avec hausse négative maximale les canons (-10 grades), on n'a pas loin s'en faut les 6 calibres de marge de sécurité entre la trajectoire de l'obus et le béton… Il faut soit limiter le site négatif maximal à - 8 grades (avec perte de couverture du terrain), soit retailler le béton de la contrescarpe entre 5 et 20 centimètres. Le coût de l'opération est important et la perte de couverture liée à une limitation à -8 grades est faible, dans une zone de toute façon couverte par les 75 du BARBONNET. La DTF propose donc l'option de limitation du champ de tir en site négatif. Informée, la CORF réagit par une note assez sèche rappelant que le calcul de hauteurs de murs est le B-A-BA du Génie mais qu'en l'occurrence on peut plutôt accepter une dérogation à la cote de sécurité de 6 calibres… Les choses resteront donc en l'état.

En novembre 1934, le projet de réseau barbelé de protection de l'ouvrage (dossier 626/F du mois de Juillet) est rejeté par la Direction du Génie au motif - outre son prix prohibitif ! - de l'absence de protection de ce réseau côté sud, là où les blocs B (artillerie sud) et G (observatoire et GFM) ont été reportés en 2e cycle. Les autorités redécouvrent que l'absence de ces blocs ajournés ne permet pas la défense des approches par le sud et met le bloc F (B6 - mortiers 81mm sud) dans une situation de vulnérabilité inacceptable. Cela justifie des changements de dernière minute pour corriger cette importante faiblesse. Le changement le plus significatif sera le remplacement in-extremis de la cloche LG (*) prévue sur le Bloc 6 (Bloc F du projet) par une cloche GFM, mieux adaptée pour le flanquement de réseau. L'étude faite aboutit à la nécessité d'accepter une émergence considérable de cette cloche pour avoir un minimum d'action sur les alentours du fait de la position à contrepente et enfoncée du bloc. Pour minimiser cette excroissance, la cloche est munie d'une forte collerette en béton pour la masquer autant que possible. Bien que la solution bricolée et imparfaite relève clairement de l'emplâtre sur la jambe de bois, on peut considérer que cette cloche GFM du B6 est en fin de compte une forme de renaissance partielle de feu le bloc 7 qui aurait du contenir cette cloche. Au passage, le nouveau projet de réseau barbelé et de délardements du terrain défini en 1935 est remis sine-die du fait de la détente avec l'Italie. L'heure de ce type de dépenses importantes est passée.

Dans le cadre du programme général d'équipement des ouvrages des Alpes en armes mixtes, la CORF approuve (note 755/ORF du 9 Juin 1935) l'équipement de la cloche JM du bloc D (B4) avec cet armement à la place du jumelage conventionnel. La cloche ne sera jamais équipée du fait des retards d'approvisionnement. A cette occasion se pose la question de la conversion de l'un des créneaux FM de l'entrée de l'ouvrage pour recevoir lui aussi une arme mixte, mais cette idée ne verra jamais le jour.

Le Gal BELHAGUE fait une dernière visite à CASTILLON en tant que président de la CORF début Octobre 1935, peu de temps avant la dissolution de la commission. Il suggère plusieurs améliorations sur l'ouvrage : elles portent sur l'usine, mais surtout sur l'imperfection du supportage de la dalle de toit du bloc 6. Le mur de refend ne porte en effet la dalle que sur la moitié de la largeur de la chambre de tir. La suggestion de BELHAGUE est de le prolonger jusqu'au bout et d'aménager deux accès à la mezzanine (**). Par ailleurs ils s'ouvre de son inquiétude de voir un canon placé sur la route du col St Jean - en face de l'entrée - arriver à tirer en enfilade dans la porte blindée de fond d'entrée et d'atteindre la porte de l'usine qui est malencontreusement dans l'alignement derrière (***)… La DTF répond à cette inquiétude en re-proposant la conversion de deux créneaux FM de l'entrée - et du créneau FM du bloc B3 - en créneaux pour arme mixte permettant de contrebattre le canon en question, et en rajoutant une tôle de blindage escamotable contre le mur du virage de l'entrée juste sur la trajectoire théorique de la porte de l'usine !. Là encore, non suivi d'effet au vu de la probabilité infinitésimale qu'un tel coup au but advienne...

L'ouvrage est classé dans la liste de 1e série des places de guerre par décret du 27 septembre 1935.

La montée des tensions au printemps 1939 entraine une accélération des travaux de finition des ouvrages, qui progressaient à petite vitesse. Ainsi, dés le mois d'Avril on travaille à l'obturation par une grille du bloc cheminée (relativement exposé et mal couvert par les armes de défense périphérique), et à l'équipement en armoires, étagères, régénérateurs de silicagel, etc, des chambres de tir et PC de blocs.

La mobilisation la déclaration de guerre suit permet la relance certains travaux restés en plan par manque de moyens. La main d'œuvre subitement abondante va en particulier permettre de faire les travaux d'aménagement de terrain et de pose de réseau laissés de côté depuis 1935. Fin octobre 1939, une bonne partie du réseau de 1e Urgence est posé et une grille est posée sur le débouché des évacuations du bloc cheminée. Les roctages et délardements de terrain pour améliorer le champ de tir des armes de défense rapprochée prennent cependant du retard.

Rédaction initiale : Jean-Michel Jolas - Juin-Octobre 2019 - © wikimaginot.eu
complété en Mai 2020.

Notes
* … qui n'était heureusement pas encore posée. Cette cloche est par contre déjà produite, et n'attend plus que son envoi sur site, ce qui sera bien sur initialement suspendu le temps de l'étude de son remplacement, puis annulé.
** le projet sera étudié en 1936 car loin d'être évident en terme de jonction entre le nouveau mur et les dalles existantes, programmé pour le budget 1937, mais non réalisé vu le cout… A noter que le Gal FROSSARD de l'ITTF suggère dans les échanges d'évaluer les autres chambres de tir pour mortiers de 81mm, qui pourraient présenter le même problème.
*** sérieux défaut de conception, non relevé initialement lors de la définition du projet.
Source(s) :
SHD - carton 2V246, archives CORF Sud-Est



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