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Ligne Maginot et guerre des gaz



Fil ouvert par DRAGLOR ( 24 ) - Posté le 13/07/2016

Bonjour a toutes et a tous.
Nouvellement inscrit (depuis l'etranger et donc clavier sans accents aisement accessibles).
Les ouvrages etaient proteges contre une attaque chimique.
L'armee francaise disposait d'un arsenal ad hoc, a titre de represailles exclusivement (cf. reserves sur le Protocole de Geneve de 1925).
Existe-t-il des etudes/projets/reflexions de doter les ouvrages d'artillerie d'un stock, meme limite, de projectiles speciaux ?


Réponse de jolasjm ( 6927 ) - Posté le 14/07/2016

Bonjour,

La question est tout à fait intéressante. L'armée française était en effet consciente du risque chimique compte tenu de l'impact que ces armes avaient eu en 1914-18, et - comme vous le mentionnez - les constructions issues de la CORF étaient protégées de façon assez sophistiquée contre ce risque.

La question de la dotation en munitions non conventionnelles s'est donc possiblement posée à un moment ou un autre de la conception de la ligne Maginot, soit en application de directives générales du GQG, soit comme item de discussion spécifique - officiel et dument consigné ... ou pas - lors d'une réunion de la CORF.

Un examen rapide de ma bibliographie ne m'a pas montré une quelconque velléité d'action de type non conventionnelle des ouvrages d'artillerie. Les quelques états existants de dotation en munition d'ouvrages que j'ai pu voir ne mentionnent rien sur ce sujet non plus: rien que des munitions très conventionnelles.

Peut-être que d'autres contributeurs ont plus d'informations ?

Bien cordialement
Jean-Michel


Réponse de jolasjm ( 6927 ) - Posté le 14/07/2016
Dernière modification par Pascal le 14/07/2016.
... suite.

Lire la très intéressante thèse de doctorat en pharmacie d'Arnaud Lejaille, et en particulier le chapitre sur l'entre-deux-guerres:

http://www.guerredesgaz.fr/these/chap13/chap13.htm

On y lit que :
- le protocole de Genève n'interdisait que l'utilisation mais ni la recherche, ni la production et le stockage d'armes chimiques. La doctrine française entre-deux-guerres a été très ambiguë: on n'utilise que si on est agressé de façon équivalente: bref de la dissuasion avant l'heure...
- l'armée française s'est en conséquence bien gardée de détruire les stocks inutilisés de 14-18, et elle a réinstauré une capacité de production de gaz de combat dans différentes usines militaires et privées, ainsi qu'une capacité de recherche et d'expérimentation - notamment en Algérie - entre les deux guerres.
- A mesure où les millions d'obus de 75 (en particulier) de 14-18 arrivaient à péremption, de nouveaux étaient produits. Comme conséquence d'utilisation d'armes chimiques (Ypérite, etc) par l'Espagne (guerre du Rif) et l'Italie (Guerre d'Ethiopie) la France a relancé un programme de production dés 1930. De leur côté les allemands on fait de même secrètement.
- A la mobilisation un stock de plusieurs millions d'obus de 75, 105, 120 et 155mm ainsi que de containers était entreposé dans l'ERG (Etablissement de Réserve Générale) de la Ferté-Hauterive. Parallèlement, c'est par milliers de tonnes par mois que l'industrie chimique pouvait produire à Boussens, Maussac, Jarrie/Pt de Claix, etc.
- Une et une seule unité semble avoir été habilitée à utiliser des obus chimiques en 1939-40: le 4° Groupe Autonome d'Artillerie (2° Armée). Lors de la débâcle de Mai 1940, il s'est replié en catastrophe avec son stock sans en faire usage. Ceci semble impliquer qu'en effet aucun obus de ce type n'a été prévu ni livré à la ligne Maginot.
- Une bonne partie des archives pertinentes ont été détruites ou perdues, y compris au SHD. L'histoire de ces armes entre 1930 et 1940 reste donc à approfondir.

Elément historique très intéressant rapporté par cette thèse, en lien avec la LM :

Une patrouille française aventurée de l'autre côté de la frontière lors de la "drole de guerre" serait tombée sur des containers allemands contenant un cocktail à base d'hydrogène arsenié (AsH3 pour les chimistes). Ce gaz mortel, bien identifié par les chimistes français, avait été considéré par les spécialistes des armes chimiques comme impropre à l'utilisation car très instable, volatil et inflammable, ainsi difficile à mettre en oeuvre. Très mauvaise surprise donc, car les filtres à gaz utilisés dans la ligne Maginot sont parfaitement inefficaces contre ce gaz. Seule solution contre l'hydrogène arsenié : arrêter toute ventilation des ouvrages - ainsi que l'usine bien sûr - car même en régime air gazé, l'équipage aurait été gravement perturbé. Des tests de détection du AsH3 furent développés en urgence début 1940 pour être installé devant les entrées et prise d'air, et les consignes Z de gestion de gaz furent modifiées en conséquence.

Cordialement
Jean-Michel



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