Ligne Maginot - Système de surveillance des ouvrages en temps de paix



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Système de surveillance des ouvrages en temps de paix






Généralités

En temps de paix, un grand nombre d'ouvrages sont inoccupés et le ministère de la guerre, conscient des risques de sabotage et soucieux d'éviter les visites indélicates, décida en 1937 de doter l'ensemble des chambres de coupure du réseau téléphonique de la fortification et les ouvrages laissés sans surveillance d'un système permettant de les surveiller en permanence et de retransmettre une alarme en cas d'effraction.

Ce système d'alarme effraction était d'un emploi simple et ne nécessitait pas de connaissance ni de formation spécifique du personnel appelé à l'utiliser. Il transmettait en temps réel les alarmes aux postes de garde des casernements de sureté occupés en permanence et donnait la localisation exacte de l'effraction. Des fonctionnalités de test permettaient de vérifier le bon fonctionnement de l'ensemble lorsque le système était en veille et il permettait d'établir une communication téléphonique directe entre le personnel de service ouvrant une porte et le poste de garde en utilisant le câblage des boucles.

La mise en place de ce dispositif dans la Région Fortifiée de la Lauter a fait l'objet de la note du 1060/T/Sec du 10 mai 1939 accompagnée de la liste des matériels nécessaires. Il ne semble toutefois pas avoir été effectivement déployé tel que sur la ligne Maginot, probablement du fait de son adoption tardive.
On trouve toutefois au droit de quelques portes d'entrée des 'boitiers micro rupteurs' correspondant à celui dont la mise en œuvre était préconisée, ce qui laisse supposer qu'un déploiement au moins partiel de ce système a été réalisé, peut être à titre de test ou pour la surveillance ponctuelle de quelques ouvrages après guerre. A ce jour, aucun autre élément que ces boitiers micro rupteur n'a été trouvé en place.

L’utilisation de ce système pour la surveillance des DMP chargés en permanence a aussi été proposée



Constitution du système

Le système était composé d'un Tableau d'alarme installé au poste de garde auquel des Signaleurs d'effraction installés dans les ouvrages et chambres de coupure à surveiller étaient reliés grâce aux paires inutilisées du réseau téléphonique souterrain de la ligne Maginot


Tableau d'alarme

Le tableau d'alarme est constitué d'un tableau principal d'alarme et d'un ou deux coffrets de boucle. Il est alimenté par un ensemble chargeur batteries séparé.

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Tableau d'alarme



Chacun de ces éléments (sauf le chargeur) est contenu dans un coffret doté d'un couvercle étanche de 526 par 360 mm et d'une profondeur 123 mm fixé au mur . Les couvercle des ces boitiers sont dotés d'un logement pour la capsule de produit déshydratant.
L'alarme est lumineuse et sonore, la boucle en alarme est indiquée par l'allumage du voyant lui correspondant sur le Boitier de boucle, le Signaleur d'effraction en alarme est indiqué par la lecture d'un galvanomètre sur le Tableau principal d'alarme
Chaque tableau d'alarme peut gérer au maximum 6 boucles d'alarme, comptant chacune 8 signaleurs d'effraction, soit 48 points de surveillance.

Le tableau principal d'alarme

Ce coffret assure la gestion des alarmes et permet la localisation du signaleur en effraction sur une boucle.

Il est surmonté de l'indicateur (galvanomètre) permettant la détermination du signaleur d'effraction en alarme et la mesure de l'isolement des boucles.

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Tableau principal d'alarme



Il porte en face avant 6 voyants indiquant quelle est la boucle sélectionnée pour la mesure et une règle portant l'indication pour chaque boucle de la correspondance entre l'indication lue et les ouvrages ou chambres de coupure surveillées par chaque boucle.
Il est doté du coté droit de l’interrupteur de mise sous tension et de l'inverseur de mesure, et du coté gauche, du sélecteur de boucle et de l'interrupteur de contrôle d'isolement.

Coffrets de surveillance de boucles

Ces coffrets assurent la gestion des boucles d'alarme. Ils sont dotés du coté des trois interrupteurs permettant le contrôle de l'isolement des boucles et portent en face avant les trois voyants d'alarme des boucles, un pour chaque boucle.

Ils sont reliés au tableau principal d'alarme et au répartiteur du réseau téléphonique ou arrivent les boucles de surveillance. Un troisième câble les relient au central téléphonique pour la liaison avec les postes téléphoniques pouvant être raccordés sur les jack des signaleurs d'effraction.

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Coffret de surveillance de boucle



Chaque coffret de boucle peut gérer un maximum de trois boucles, il est doublé pour porter le nombre de boucles de surveillance à 6, ce qui correspond à la capacité maximale d'un tableau d'alarme.

Chargeur et batteries

L'alimentation de l'ensemble est assurée par un chargeur de batteries avec les batteries placé sous le tableau principal d'alarme.
Ce chargeur délivre les deux tensions continues de 16 et 24 Volts nécessaires au fonctionnement du système
et assure la charge de deux batteries d'une capacité de 3 AH composée d'éléments au cadmium nickel.



Boucles de surveillance

Le système utilise deux boucles constituées d'un conducteur aller et d'un second conducteur retour. Ces boucles sont prises sur les paires en réserve du réseau téléphonique souterrain de la ligne Maginot, ce qui lui confère une grande souplesse au niveau utilisation.
Chaque boucle peut compter au maximum huit signaleurs d'effraction montés en série


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Principe des boucles de surveillance



Boucle de surveillance

La boucle de surveillance (prise entre les bornes A1 et B1 ) est utilisée pour transmettre l'alarme lorsque l'un des signaleurs d'effraction est actionné.


Boucle de communication et de mesure

La boucle de communication (prise entre les bornes C1 et D1 ) permet le raccordement d'un appareil téléphonique au niveau de la prise jack située sur chaque détecteur d'effraction permettant ainsi d'établir une liaison avec le poste de garde.
La valeur de la résistance entre elle et la boucle de surveillance est infinie lorsque le système est à l'état de veille et prend une valeur qui est fonction de la position du signaleur en alarme en cas d'effraction.

Chaque boucle peut gérer simultanément deux alarmes. Au delà, la mémorisation des évènements est compromise et la localisation exacte des signaleurs d'effraction en alarme est rendue impossible.


Signaleurs d'effraction

Les signaleurs d'effraction ont une fonction triple. Ils permettent d'une part la détection d'une effraction et sa mémorisation, et d'autre part, la connexion d'un appareil téléphonique permettant d'établir une communication directe avec le personnel chargé de la surveillance du tableau d'alarme.

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Ensemble signaleur d'effraction



Ils sont composés d'un Boitier de relayage et d'un Boitier micro rupteur reliés par câble auxquels peuvent éventuellement être adjoint un Boitier à jack téléphonique pour micro rupteur.

Boitier micro-rupteur

Boitier micro rupteur



Le boitier micro rupteur comprend un détecteur de chocs à masselotte et est doté d'une tige à ressort sur laquelle est monté un crochet réglable. L'extrémité de ce crochet est placée dans un étrier fixé sur la porte ou la trappe surveillée. La manœuvre ou des oscillations de cette porte génèrent des tractions sur ce crochet et se traduisent par des ouvertures brèves du contact de choc du boitier.

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Boitier micro rupteur
Principe de montage pour trappe de chambre de coupure



Le boitier de relayage est inséré entre le boitier micro rupteur et le répartiteur du réseau téléphonique ou il est raccordé aux boucles de surveillance et de mesure. Il a pour fonction d'assurer la mémorisation de l'alarme grâce à un relais rapide alimenté par la boucle de surveillance dans laquelle il est inséré en série. Il est doté d'un contact d'auto-maintien garantissant la mémorisation de l’évènement et le maintien en alarme du signaleur d'effraction même lorsque le boitier micro rupteur cesse d'être sollicité.

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Boitier de relayage



Le passage en alarme d'un signaleur d'effraction insère une résistance Rx entre la boucle de surveillance et la boucle de mesure. Cette résistance peut avoir quatre valeurs différentes R1 à R4 1, permettant ainsi au personnel du poste de garde d'obtenir la localisation exacte du signaleur en alarme par la simple mesure de la valeur de résistance entre les deux boucles. De plus, cette résistance est montée en série avec une diode, ce qui permet de doubler le nombre de valeurs possible, la mesure se faisant alors soit dans un sens du courant, soit en sens inverse ( +R1, -R1, +R2, -R2 ...)

Une prise jack permettant d’insérer un appareil téléphonique et d'établir une communication téléphonique avec le poste de surveillance est disponible sous un bouchon vissé étanche du coté du coffret de relayage. L'appareil qui y est raccordé est alors inséré dans la boucle de mesure et de communication.

Un Boitier à jack téléphonique pour micro-rupteur optionnel permettant le raccordement d'un appareil téléphonique pour établir une communication avec le poste de garde peut être inséré dans la liaison entre le boitier relais et le boitier micro-rupteur.
Ce boitier comprenant un second jack et un condensateur permet d'établir un circuit de communication téléphonique en utilisant un retour par la terre au travers du condensateur. Ce dispositif était installé dans le cadre de la sécurisation des chambres de coupure ayant des boitiers de raccordement téléphonique dans le couloir d'entrée car le boitier de relayage étant installé dans la pièce des répartiteurs n'était pas accessible au personnel devant pénétrer y raccorder des lignes de campagne, ceux ci ne disposant que de la clef de la trappe ou de la porte donnant accès au couloir d'entrée de la chambre de coupure.



Fonctionnement de l'ensemble:

Système en veille

Les voyants de boucle sont éteints et la sonnerie au repos. Des contrôles et des mesures sont faites deux fois par jour par le personnel de garde à partir du tableau d'alarme afin de s’assurer de l'isolement et de la continuité des boucles de surveillance et de mesure, de l'état des batteries et du système.


Déclenchement de l'alarme

Le contact de choc à masselotte du signaleur d'effraction s'ouvre brièvement sous l'effet des vibrations.
Cela active le relais du signaleur d'effraction qui, auto-maintenu, assure la mémorisation de l’évènement et rajoute la résistance Rx entre la boucle de surveillance et la boucle de mesure.

Le relais de surveillance (RS) de la boucle de surveillance est sous-alimenté et passe au repos, faisant coller le relais d'alarme (RA). Ce relais auto-maintenu entraine l'allumage de la lampe d'alarme de la boucle concernée sur son coffret de boucle et active la sonnette d'alarme.

Pour savoir quel est le signaleur d'effraction en alarme et ainsi localiser l'effraction, le personnel du poste de garde sélectionne la boucle en alarme grâce au sélecteur de boucle du tableau d'alarme et compare la valeur lue sur le galvanomètre du tableau d'alarme avec celle de la réglette correspondant à la boucle en alarme pour déterminer quel est ou quels sont les détecteurs d'effractions en alarme.

Si l'ouverture a été faite pour une raison de service, le personnel intervenant sur place rentre en contact avec le poste de garde à l'aide d'un poste téléphonique qu'il raccorde du l'un des jacks prévus à cet effet et communique le mot de passe convenu pour que le personnel de garde acquitte l'alarme.
Si les opérations doivent durer un certain temps, le personnel intervenant sur place court-circuite le contact à masselotte du signaleur d'effraction en mettant en place la barrette prévue à cet effet au niveau du bornier du boitier micro-rupteur.
Lorsque il quitte la construction sous surveillance, il supprime le cas échéant le court-circuit mis en place et prévient le poste de garde avant de fermer la porte ou la trappe.

L'effacement des alarmes est obtenu par la coupure de alimentation électrique du tableau. Cela a pour effet de faire retomber les relais mémorisant les évènements et de remettre le tableau à l'état de veille.



Surveillance des dispositifs de mine chargés en permanence

La surveillance nécessaire des dispositifs de mine chargés en permanence a fait l'objet d'une notice technique émise par la Section Technique du Génie en janvier 1937 2.
La solution retenue est basée sur le tableau d'alarme et les matériels de boucles de surveillance tels que définis ci-dessus mais recours à un signaleur d'effraction spécifique pour la protection de la trappe d'accès au lieu des signaleurs d’effraction du système standard.

Le principe est basé sur un puits doté de deux trappes, la première étant une trappe en tôle et la seconde trappe étant une trappe blindée offrant une excellente résistance à l'effraction. Le tableau d'alarme est placé dans un poste de garde occupé en permanence et disposant d'équipes prêtes à intervenir.

Dispositifs de sécurité pour les dispositifs de mine chargés en permanence

P,Détail du puits d'amorçage protégé et de son équipement



Le signaleur d'effraction est remplacé par un dispositif composé d'un fil serpentant sous la face intérieure de la première trappe et de contacts placés dans la feuillure de la trappe. Le réseau de fil permet de détecter tout percement de la trappe et les contacts de feuillure toute ouverture de cette dernière.

Dispositifs de sécurité pour les dispositifs de mine chargés en permanence

Dispositif de détection d'intrusion ou d'effraction



L'idée maitresse était de pouvoir signaler toute effraction sur la première trappe aux agents chargés de la surveillance du DMP et de leur permettre d'intervenir avant que les auteurs de l’effraction n'aient pu ouvrir la seconde trappe et accéder au dispositif de mise à feu proprement dit.

A ce système anti intrusion se rajoute une fonctionnalité de contrôle d'accès. La première trappe est dotée d'une serrure classique mais la seconde trappe est elle dotée d'une gâche électrique commandée à distance. La demande d'ouverture de la trappe se fait grâce à un poste téléphonique raccordé sur le jack de la boite à relais permettant la liaison avec le poste de garde.

La mise en en place de ce dispositif nécessitant la création de puits d'amorçage spécifique et la pose d'un réseau de câbles entre les puits et le poste de garde supposait des travaux conséquents. Aucune implémentation de ce système ne nous est connue.






1 - Valeur ohmique de la résistance : R1 = 2 000 Ohms, R2 = 3 500 Ohms, R3 = 6 000 Ohms et R4 = 10 000 Ohms. Ordre dans la boucle +R1 , -R1, +R2 , -R2 ...
2 - Notice technique sur les dispositifs de sécurité pour les dispositifs de mine chargés en permanence - STG janvier 1937




Rédaction

Pascal Lambert




Sources :

Notices descriptive des matériels (voir documents joints).





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