Jean Marie DEGOUTTE nait le 18 Avril 1866 à Charnay (Rhône) d'une famille d'agriculteurs.
Il épouse Eléonore Péguet le 5 Novembre 1902.
Il décède à Charnay le 30 Octobre 1938 (72 ans).
Jean Marie DEGOUTTE s'enrôle volontairement comme simple soldat en Mars 1887 au 30° RA d'Orléans puis entre à l'Ecole Spéciale Militaire en 1888 dont il sort - très bien classé - sous-lieutenant en Octobre 1890. Affecté en Algérie, il est promu Lieutenant en Octobre 1892. Sa demande d'affectation à un corps expéditionnaire vers Madagascar ayant été plusieurs fois refusée, il se met en congé de l'armée, apprend le Malgache et part là-bas à ses propres frais. Sur place, il arrive en Avril 1895 à se faire reprendre par le directeur des étapes de l'expédition. Après un an comme responsable d'étape sur place, il rentre en Europe pour raison médicale. Sa convalescence est mise à profit pour visiter l'Autriche, apprendre l'allemand, et préparer le concours de l'Ecole supérieure de Guerre… A son retour, il est affecté au 112° RI (Antibes) où il reste deux ans jusqu'en 1899. Il est promu Capitaine en Décembre 1896.
Entré en Novembre 1899 à l'Ecole de Guerre, ses études y sont interrompues par sa volonté de faire partie d'un corps expéditionnaire en Chine où il officie comme officier de renseignement (cité deux fois). De retour fin Septembre 1901, il est affecté au 21° RI (Langres) et reprend le cursus de l'Ecole de Guerre dont il sort en Novembre 1902 avec brevet d'Etat-Major, suivi d'un stage d'EM au 4° Corps d'Armée (CA) puis en Algérie de 1903 à 1906. Il revient au 20° Corps d'Armée (Nancy). Il est promu Chef de Bataillon en Décembre 1906.
Après un court retour à Antibes comme commandant de bataillon du 112° RI, il repart en Afrique du Nord et s'illustre lors de la campagne au Maroc. Promu Lt-Colonel en Mars 1912, il suit les cours des Hautes Etudes Militaires en 1913 après son retour du Maroc.
DEGOUTTE est chef d'Etat Major du 4° CA lors du déclenchement de la Grande Guerre. Il participe aux batailles de Ardennes et de la Marne (cité une fois à l'ordre du CA), puis est promu Colonel en Novembre 1914. Nommé chef d'Etat-Major de la 4° Armée en Janvier 1916, il prend les galons de Général de Brigade en Mars suivant. Nommé commandant de la 1° Division Marocaine alors qu'il n'a jamais commandé de Régiment, il participe aux batailles de la Somme et des Monts (1917). Il est promu Gal de Division à titre temporaire en Septembre 1917 après avoir participé à la 2e offensive de Verdun puis prend en Octobre 1917 le commandement du 21° CA. Lors de la difficile bataille de la Marne en Mai-Juin 1918, il se distingue par son énergie et son caractère, lui permettant d'acquérir ses étoiles à titre définitif et de prendre le commandement de la 6° Armée. Il parvient à bloquer les allemands sur la Marne, à reprendre l'offensive et Château-Thierry et repousser l'ennemi.
A la fin de la guerre, en Septembre 1918, il passe aux commandes du Groupe d'Armées des Flandres et Major Général du roi des Belges. A ce poste, il repousse les allemands en Belgique et libère la partie Sud-ouest du pays. En Novembre 1918, il reprend le commandement de la 6° Armée. Après un court passage à la tête de la 1° Région Militaire (Lille) en 1919, puis de la 3° Armée, il devient le 13 Octobre 1919 commandant de l'Armée du Rhin, chargé de l'occupation des territoires de la rive gauche du fleuve en Allemagne.
Il excelle dans ce rôle autant politique que militaire au point qu'en Janvier 1920, il est nommé commandant en chef des forces d'occupation alliées en Rhénanie et entre à ce titre au Conseil Supérieur de la Guerre (CSG) . A ce titre, il est en première ligne lors des événements de 1923 : l'occupation et prise de contrôle des ressources de la Ruhr par les armées belges et françaises pour accélérer le remboursement de la dette de guerre allemande. L'éventualité de l'évacuation de la Ruhr et la détente générale des relations diplomatiques avec l'Allemagne le poussent à demander une autre affectation, remplacé par le Gal GUILLAUMAT .
Il est détaché en Octobre 1924 comme membre permanent du CSG et inspecteur du Sud-Est puis commandant désigné de l'Armée des Alpes à sa création en 1925. Il reste dans ce rôle important jusqu'à son versement au cadre de réserve, le 3 Avril 1931, avec le grade de Général d'Armée. Il se retire dans le Sud-Est.
Le Général DEGOUTTE aura un rôle très important dans les questions de défense du Sud-Est et de la fortification alpine. Auteur d'un important travail de préparation à partir de 1925 en temps que membre du CSG et commandant désigné de l'Armée des Alpes, il produit un Programme sur la Défense du Sud-Est qui - approuvé en 1927 - résume la vision des Alpins relative à la protection de la frontière. Celle-ci promeut la défense au plus proche de la crête frontière, basée sur de petits ouvrages d'infanterie ou blockhaus interdisant les passages. Ce programme général reçoit un début de mise en œuvre à partir de 1928 sous le nom de "Programme Réduit de Défense de Nice", dont l'élément le plus marquant est le lancement des travaux de l'ouvrage de RIMPLAS.
Ce rapport et les vues qu'il contient est cependant remis en cause et battu en brèche par la CDF , qui préfèrerait appliquer dans le Sud-Est la même concepts que dans le Nord-Est. Malgré les multiples approbations reçues du Ministère, le programme de DEGOUTTE est enterré par l'Etat-Major en 1928 : la CDF prend officiellement le contrôle des questions de fortification dans les Alpes, et une fois le nouveau rapport sur la Défense du Sud-Est produit par elle et approuvé en Février 1929, la CORF prend le relai en Mars 1929 pour établir le plan de déploiement concret des fortifications nouvelles.
Durant cette période 1927-1930, le Gal DEGOUTTE est donc en conflit ouvert avec la CDF et l'Etat-Major sur cette question de fortification du Sud-Est. Conformément à son opiniâtreté personnelle et son sens politique, il fera tout ce qui est en son pouvoir pour infléchir le cours des choses et faire valoir les approches développées depuis des décennies par les Alpins. Mettant à profit ses relations amicales avec le Gal WEYGAND - qui avait pris la succession comme Chef d'Etat Major du Gal DEBENEY avec qui les relations étaient tendues - et constructives avec le Gal LEFORT (Directeur du Génie), il parvient à convaincre partiellement de ses vues le Mal PETAIN, qui l'autorise en Mai 1930 à lancer un programme de construction d'avant-postes conformes aux théories de l'Armée des Alpes. DEGOUTTE parviendra ainsi à construire partiellement par la Main d'Œuvre Militaire les organisations qu'il avait théorisé en 1926-27 et qui avaient été rejetées par la CDF. A son départ en 1931, ce programme d'avant-postes est bien avancé, laissant sur le terrain un aperçu de ce qu'aurait pu être la "Ligne DEGOUTTE".
Le Gal DEGOUTTE a l'honneur d'un article dans le journal local de l'Action Catholique piémontaise "Il Momento" du 10 Juin 1925. Les reconnaissances qu'il mène sur la frontière des Alpes-Maritimes, avec le Gal GEORGES, dans le cadre de l'étude de son projet de défense des Alpes ne sont en effet pas passé inaperçues…
L'article en question est dument traduit et conservé dans les archives de l'EMA*, car significatif de l'état d'esprit de l'époque.
Bien qu'il y ait seulement quelque agitation fomentée par les phalanges fascistes dans le Niçois à ce moment, principalement orientée contre les italiens ayant fuit en France l'arrivée au pouvoir de Mussolini, l'article s'étonne de cette soudaine activité d'inspection militaire dans le contexte de détente internationale, d'amitié franco-italienne (le jubilé du règne de Victor-Emmanuel III a été dument fêté à Paris peu de temps avant) et de respect mutuel.
Regrettant au passage le "don" d'une partie de la Haute-Roya à la France en 1861, ce qui rend la situation tactique et politique italienne compliquée dans ce secteur, le journal tente de spéculer sur cet examen par les français des positions dominant cette vallée. Un tel regain d'intérêt des militaires français se serait aisément expliqué quand l'Italie a construit les fortifications du col de Tende pour se parer d'une attaque française suite au transfert du Niçois à la France, ou qu'elle s'alliait dans le cadre de la Triplice avec l'Allemagne et l'Autriche, mais les deux pays sont maintenant alliés, alors pourquoi ?...
S'en suit une évocation de la carrière du Gal DEGOUTTE et en particulier de son travail de mise au pas des allemands en Rhénanie, que le Général vient d'achever. Cela n'est pas sans déplaire au journal - nda : un sentiment antiallemand hérité de la grande guerre existe alors en Italie - qui note par ailleurs les grandes qualités militaires du général (qualifié de "héros" de la guerre, digne du Walhalla !), mais aussi et surtout avec quelque ironie son sens politique. Nommé le "Mazarin de la politique du Quai d'Orsay"(sic) en Allemagne, DEGOUTTE est cependant accusé par la journal d'avoir au passage acheté et agité les séparatistes rhénans contre le pouvoir allemand et d'avoir réussi à obtenir de ceux-ci des prises de position "anti-prussiennes"(re-sic) de nature à détourner l'attention de l'occupation française.
L'article conclut sur un ton caustique en souhaitant "Que l'air généreux, qui des terres d'Italie s'exhale et se répand jusqu'au dehors des frontières auxquelles on veille, soit salutaire à la sentinelle de la France tremblante de peur !!!!"(sic)
- Légion d'Honneur : Officier en 1915, puis commandeur (Mai 1917) puis Grand Officier (Décembre 1918) et enfin Grand-croix de la Légion d'Honneur en 1923.
- Médaille Militaire (1928)
- Croix de Guerre 1914-18 (6 citations).
- Médailles commémoratives des campagnes de Madagascar, de Chine et du Maroc
- Officier d'académie
- Grand-Croix de l'ordre de la Couronne (Belgique)
- Nombreuses distinctions étrangères (DSM d'Angleterre, Japon, Tunisie, Serbie...)