Le 76° Bataillon Alpin de Forteresse (BAF) est créé le 16 octobre 1935 à Nice à partir du Ve bataillon du 3° RIA et devient l’héritier des traditions du 58° RI.
Il fait partie, avec les 74° et 75° BAF, de la 58° DBAF. Il est alors constitué d'une section de commandement, d’une SHR (qui deviendra compagnie), d'une compagnie d’engins d’accompagnement, de trois compagnies mixtes et d’une SES.
Son PC est situé à Nice dans la caserne Riquier (quartier Saint-Jean-d’Angely) qu’il partage avec le 22° BCA.
La première compagnie est cantonnée au fort de la Tête de Chien (La Turbie), la seconde est à Carnolès (Roquebrune Cap-Martin) ou elle partage le quartier du 25° BCA et la troisième au fort de la Revère (Eze). La SES partage le poste d’hiver de Plan Caval avec celle du 75° BAF.
Sa devise est Dau bec e dai oungla (que l’on peut traduire « avec bec et ongles »)
Le 76° BAF du temps de guerre est un bataillon de réserve de type A. Il est mis sur pied le 29 Août 1939 au col de Segra par le Centre de Mobilisation de l'Infanterie 152 (CMI 152) de Nice à partir de la 1° Cie du 76° BAF du temps de paix. Le 3 septembre il prend officiellement le nom de 76° BAF.
Le nouveau bataillon est constitué d’un état-major, d’une section de commandement, d’une section de mortiers de 81, de deux compagnies mixtes, d’une CHR (créée le 2/9/1939) et d’une SES. Il compte 24 officiers, 68 sous-officiers et 684 caporaux et alpins.
Le 76° BAF occupe désormais le quartier Castillon au sein du sous-secteur Corniches, ainsi que les ouvrages s'y trouvant (1), toujours sous le commandement du SFAM.
• PC : Mont Ours
• 1° Cie : Col de Ségra
• 2° Cie : Col du Verroux puis « Côte 944 »
• SES : Col du Roulabre
• CHR : Yéga
La SES du 49° BCA (Colla Bassa) lui sera également rattachée suite au départ de son bataillon, en janvier 1940, pour le nord-est.
Les hommes participent jusqu’en juin 1940 à des travaux d’organisation défensive : pose de réseaux de barbelés, construction de blocs bétonnés et d’abris pour le personnel. La SES, quant à elle, aménage ses positions au col du Roulabre ou elle y construit ses abris. En février 1940, elle ira parfaire son aptitude à l’école de ski de La Céva avant de retrouver ses positions
Le 76° BAF est affecté au Secteur Fortifié des Alpes Maritimes .
Commandement : Cne puis CB COLAS Michel (active)
Adjudant-Major : Cne LANGUEDOCQ Marcel (Réserve)
1° Cie
Cne RAYBAUD Paul (Réserve)
2° Cie
Cne LANGUEDOCQ puis Lt TERSAC Pierre (Réserve)
CHR
Cne MAZEL Antoine (Réserve)
SES
S-Lt JEANNEL de THIERSANT puis SLt BARON Georges à compter du 27 octobre 1939
GO de CASTILLON
Cne FINIDORI Jacques (Active)
- AP de PIERRE-POINTUE : 2° Cie
- PA de Fascia Fonda : 2° Cie - Sgt MEGE - CC FRUCHARD
- AP de La PÉNA : AC OLIVIER puis VIDAL
- AP de Baisse de SCUVION : AC VIGNAU
De l’entrée en guerre de l’Italie (10 juin 1940) au 13 juin la situation dans le quartier est calme mais le 14, très tôt dans la matinée, les Italiens font une incursion sur les pentes du Grammondo. Appuyés par des armes automatiques et de l’artillerie ils font prisonniers les 4 chasseurs de la SES du 49° BCA occupant le poste avancé du Grammondo.
Du 15 au 21 juin les Italiens testent le dispositif Français en lançant de nouvelles incursions sur les différents points de passage. Celles-ci sont vite contrées par les deux SES et par l’artillerie Française.
Le 22 juin marque le début de l’offensive générale.
Face au 76° BAF l’infanterie Italienne, soutenue par son artillerie, lance son attaque par le col du Cuore, le pas du Mulacier , le col du Treitore, les pentes du Grammondo et le pas de Strafourche. Les ouvrages d’AP sont particulièrement visés par l’artillerie Italienne. Ceux-ci commencent à tirer avec leurs mitrailleuses sur les passages obligés.
A la mi-journée la SES 76 se replie sur le mont Razet situé entre les AP de Baisse de SCUVION et de PIERRE-POINTUE . L’artillerie Française (ouvrages du MONT-AGEL, de SAINTE-AGNES, du BARBONNET et de l'AGAISEN (ainsi que celle de campagne) harcèle les Italiens. En début d’après-midi, devant l’AP de La PÉNA , le poste avancé de Fascia Fonda occupé par un groupe de combat du 76° BAF est encerclé par des Italiens surgissant du brouillard. Le combat acharné sera fatal à 5 défenseurs (2), 2 seront blessés, 1 porté disparu et 4 réussiront à rejoindre l’AP de La PÉNA .
En milieu d’après-midi la SES 76, toujours au sommet du mont Razet, est prise sous un violent tir d’artillerie. Dès l’arrêt de celui-ci elle s’aperçoit que les Italiens en ont profité pour s’infiltrer, à la faveur du brouillard, sur toute l’étendue de la crête. Epaulée par quelques hommes de la SES 49° BCA et de PIERRE-POINTUE les Français tirent au jugé dans le brouillard avec ses FM, mousquetons, grenades et VB. Ils reçoivent l’ordre d’effectuer une contre-attaque mais les infiltrations d’Italiens continuent par la crête descendant du Razet et par les deux versants (vers les AP de Baisse de SCUVION et de PIERRE-POINTUE ). Devant l’impossibilité de tenir les positions ils reçoivent l’ordre de se replier sur CASTILLON .
Vers 20h00 les italiens, toujours favorisés par le brouillard réussissent à s’infiltrer à travers le réseau de barbelé de l’AP de PIERRE-POINTUE et encerclent l’ouvrage. Les Alpins aux postes de combats extérieurs réussissent à rejoindre l’intérieur de l’ouvrage excepté les Alpins Maurel Léon et Limon Fortuné qui sont pris à leur poste de combat.
Dans la soirée l’équipage de l’AP de La PÉNA voit arriver les 4 alpins du poste avancé de Fascia Fonda ayant réussi à se replier (3). Une patrouille de l’ouvrage part en reconnaissance sur le poste et découvre les corps des Alpins Philippot, Feduccio et Ramel.
A PIERRE-POINTUE l’équipage doit se replier dans la partie centrale de l’ouvrage car les italiens lancent des grenades devant les créneaux des casemates. Devant la situation l’adjudant-chef Lanteri demande un tir d'artillerie sur l'ouvrage. Toute la nuit, à intervalle irrégulier les obus tombent sur l’avant-poste tandis que les jumelages du bloc 5 du GO de CASTILLON interdisent l'accès aux portes blindées.
A SCUVION les Italiens sont maintenus à distance par un feu nourri (mitrailleuses, FM, mousquetons, grenades et VB) mais un membre de la SES 76 y est tué (4). Comme pour PIERRE-POINTUE les dessus de l’ouvrage reçoivent toute la nuit des tirs d'interdiction par l’artillerie Française.
Au matin du 23 juin 1940 après un dernier tir d'interdiction sur l’AP de PIERRE-POINTUE , cinq volontaires sortent sous le couvert du brouillard et alors qu’ils sont sur les dessus ils aperçoivent une section ennemie qui monte vers l’ouvrage. L’alpin Vittet ouvre le feu avec son FM, plusieurs italiens tombent, les autres se sauvent en abandonnant leur armement. D’autres stationnés sur les dessus sont attaqués à la grenade et 10 se rendent. Une quantité importante de munitions et d’armes, dont 4 FM, sont récupérés et ramenés à l'ouvrage, ainsi qu’un blessé.
Du côté de l’AP de Baisse de SCUVION les bombardements de la nuit ont permis de tenir à distance les assaillants. Ceux-ci dominent toujours l’ouvrage depuis les pentes du Razet et reçoivent de nouveaux renforts arrivent par le col du Cuore. L’adjudant-chef Vignau demande aussitôt un tir d’artillerie sur ces renforts qui sont mis en déroute. Vers 16h00. Les prisonniers de PIERRE-POINTUE sont convoyés à CASTILLON .
La soirée voit une nouvelle tentative sur l’AP de Baisse de SCUVION qui réplique avec ses mitrailleuses, FM et son mortier. L’adjudant-chef Vignau fait appel à l’artillerie pour un tir d'interdiction sur l’ouvrage et toute la nuit ceux-ci pilonnent l’ouvrage. Il en est de même avec les jumelages de CASTILLON . PIERRE-POINTUE lui reçoit durant la nuit le renfort d’un sergent et de neufs alpins (5). Du côté de l’AP de La PÉNA on ne signale aucune tentative ennemie sur l’ouvrage durant la journée mais des infiltrations ont lieu par le pas de la Vieille et le pas de la Corne en direction de la prairie de Morge (Mourga) vite encadrées par notre artillerie.
Le 24 juin au matin la situation reste confuse. Des tirs sporadiques ont lieu partout, même de la part de points d’appuis de la Position de Résistance. Les Italiens occupent toujours la crête du Razet malgré les bombardements sporadiques qui continuent (et qui continueront toute la journée).
Les AP de Baisse de SCUVION et PIERRE-POINTUE observent les Italiens procéder à l’évacuation de corps ou blessés par des brancardiers. L’AP de La PÉNA constate les mêmes événements dans la prairie de la Morge. Un peu partout le gros des assaillants se replient vers la frontière, ont-ils eu l’information que l’armistice allait être signé dans l’après-midi ?
Le 25 juin à 02h00 l’équipage de PIERRE-POINTUE entend l’ordre de cesser le feu sonné par un clairon du poste de commandement du Mont Ours (6).
Au lever du jour la météo se met, en ce jour de fin de combats, désormais au beau temps. Vers 5h50 une reconnaissance des environs est effectuée et de nombreux corps sont observés, la plupart du temps à leurs postes de combats avec leurs armes en positions. Vers 8h, un officier Italien accompagné de cinq brancardiers, sous couvert d’un drapeau avec une croix rouge (7), se présente devant l’ouvrage avec pour mission d’évacuer les corps. L’adjudant-chef Lantéri les laisse approcher et à ce moment-là une quarantaine d’hommes surgissent, mettent un FM en batterie, prétendent retenir prisonnière la garnison et occuper l’avant-poste. Après un moment de flottement l’adjudant-chef Lanteri fait remarquer que l’armistice est signé et qu’il s’agit d’une violation de celui-ci. En même temps CASTILLON ayant été prévenu envoie un officier pour parlementer et l’incident est clos, les Italiens retournant sur leurs positions initiales.
A la cessation des hostilités (25 Juin 1940 à 0h35), le bataillon aura à déplorer 7 tués :
• Caporal-chef Fruchard Robert, 20 ans
• Alpin Bosio Honoré, 32 ans
• Alpin Feducio Jean, 32 ans
• Alpin Mourre Julien, 24 ans
• Alpin Philippot René, 25 ans
• Alpins Ramel Ange, 25 ans