Les
régions fortifiées conçues sous la responsabilité de la
CORF se présentent comme des fronts continus, disposant (hors éléments logistiques) jusqu'à 10-15 kilomètres de profondeur.
Au plus proche de la frontière on trouve des
postes GRM (blockhaus pour Gardes Frontières) servant de protection des passages de frontière et de "sonnette d'alarme" en cas d'attaque.
Dans l'intervalle entre ces postes GRM de la
Ligne Principale de Résistance (LPR) se trouvent de nombreux bouchons d'avant-poste faits de petits blockhaus groupés autour et dans les villages et sur les voies de passage. La finalité de ces avant-postes est de ralentir l'avancée d'un éventuel assaillant pour permettre la mise en ordre de bataille de la
LPR . Les avant-postes ou les postes GRM peuvent actionner au besoin ou sur ordre des
dispositifs de mine permanents (DMP) permettant la destruction de points de passages ou de routes.
La LPR vient ensuite.
Elle constitue le chef-d'œuvre de la CORF, offrant un feu d'infanterie continu, fait d'une alternance de casemates d'infanterie et de
petits ouvrages , couverts aux endroits les plus puissants par de
gros ouvrages d'artillerie. Prioritairement, les casemates et petits ouvrages assurent la continuité du flanquement de feu d'infanterie (mitrailleuses et canons antichar) sur le front. Les gros ouvrages - là où ils existent - se couvrent mutuellement et protègent leurs intervalles tout en étant capable de battre la plupart du temps la zone entre LPR et frontière.
La LPR est immédiatement précédée par un
obstacle antichar /antipersonnel fait de barbelés, de rails, et dans certains cas de fossés. Les passages routiers ou ferroviaires au travers de la LPR sont protégés ou sujets à destruction préparée.
Juste en arrière de la LPR, dans une bande d'un kilomètre, on trouve un certain nombre d'
observatoires d'artillerie isolés et des
abris de surface ou
caverne pour la protection des troupes d'intervalle.
L'ensemble de ces éléments est relié par des routes stratégiques, des
chemins de fer militaires à voie étroite (0,60 m) ou normale pour le ravitaillement, et tout un réseau téléphonique, spécialisé, enterré et émaillé de boites de coupures (blockhaus souterrains de connexion).
Plus en arrière, on trouve des dépôts locaux spécialisés pour les
munitions ou le
matériel de Génie , ainsi que des casernements nouvellement construits et servant à accueillir les troupes de forteresse hors occupation des ouvrages.
Enfin, loin en arrière existent d'autres éléments logistiques comme des Parcs à Munition centraux (ex: Mars-la-Tour) et des postes de transformation électrique casematés permettant l'alimentation électrique spécialisée des ouvrages.
La structure existant dans le Sud-Est est largement identique à cela, aux spécificités près de la présence de reliefs qui rendent la ligne beaucoup plus discontinue, sauf dans les Alpes-Maritimes.
Les ouvrages, qu'ils soient petits ou gros, sont bâtis sur le même principe: des blocs de combat d'artillerie ou d'infanterie dispersés en avant au niveau de la LPR, reliés entre eux et avec un secteur logistique souterrain via des galeries pour piétons ou train à voie étroite. La ou les entrées des ouvrages - souvent une
entrée munitions et une pour
les hommes dans les plus gros ouvrages - sont défilées en arrière encore du secteur logistique souterrain, et situées généralement dans un vallon ou un repli de terrain. Dans la réalité et pour des raisons d'économie, les petits ouvrages auront rarement une entrée arrière et l'accès se fera directement par les blocs de combat. La
gestion des flux de matériel et de munitions , ainsi que l'organisation du fonctionnement humain et technique de ces ouvrages, vrais sous-marins terrestres, fait l'objet de procédures et de méthodes très précises.
Les
casemates sont des organes isolés de combat qui sont conçues selon les mêmes principes que les blocs d'ouvrage, à ceci près qu'elles n'ont en principe pas de locaux souterrains profonds.
L'
observatoire isolé se compare à une casemate simplifiée disposant de moyens d'observation (cloches, périscopes) spécifiques. Il est relié téléphoniquement aux PC des gros ouvrages d'artillerie.
Les abris d'intervalle sont de deux types : surface ou caverne. Les
abris de surface sont de gros blocs à un ou deux étages permettant de loger 12 à 120 hommes selon leur taille. Les
abris caverne sont composés de locaux souterrains profonds auxquels on accède par deux entrées fortifiées en surface.
Le
degré de protection de ces constructions est proportionnel à l'épaisseur de béton armé. Ceci est défini à la conception. Il existe quatre degrés de protection permettant de résister à deux coups superposés de calibre donné. Le plus important (Protection 4) est réservé aux blocs des gros ouvrages ou aux constructions les plus stratégiques et permet de résister aux plus gros calibres d'artillerie connus ou envisagés à l'époque.
Par principe même de conception, l'armement des éléments CORF de la ligne Maginot est spécifique, fixe et indissociable des blocs de combat. Ceci garantit standardisation, efficacité optimale, disponibilité maximale, ... Ces armements sont soit sous casemate - tirant donc via des créneaux sous béton - soit sous
cloches cuirassées fixes, soit sous tourelles rotatives à éclipse.
On trouve côté infanterie :
Certaines armes, prévues pourtant, ne furent jamais mises au point par manque de temps, tel le lance-grenade de 60 mm pour cloche, ou le canon de 145 mm longue portée pour tourelle tournante.
Il peut paraître surprenant d'équiper de grands blocs en béton avec des armes d'artillerie d'assez faible calibre. En réalité, c'est bien la cadence de tir au travers de la semi-automatisation de la manutention des projectiles qui a été privilégiée, au détriment d'armes lourdes mais lentes. Une pièce unique de 75mm Mle 1933 pouvait ainsi délivrer jusqu'à 30 projectiles par minute sur sa cible.
Une fortification aveugle ne sert à rien. En vertu de ce principe, la CORF fit équiper les ouvrages et observatoires de cloches et créneaux permettant cette observation au moyen d'épiscopes et de périscopes de différents types et grossissement. En combinant plusieurs observatoires, il est ainsi possible d'assurer une triangulation précise des cibles et de diriger efficacement un tir d'artillerie. Ceux-ci bénéficiaient d'une forte programmation du fait du caractère statique de l'artillerie de forteresse, permettant des réglages précalculés précis et rapides. Ainsi, il suffisait de moins de 3 minutes entre l'observation d'une cible et l'envoi des premiers obus. Ajoutant à cela une alimentation mécanisée des pièces et l'utilisation de culasses semi-automatiques permettant des cadences fortes, ceci explique la grande efficacité (attestée par les allemands...) des canons de la ligne Maginot.
Parallèlement à cette fortification spécialisée et d'une grande sophistication, on trouve des milliers de simples blockhaus de plus petite taille, allant du plus simple poste de combat construit à base de rondins de bois empilés, au bloc pour mitrailleuse et/ou canon antichar, et parfois des casemates pour pièces d'artillerie de campagne, le tout construit par la
Main d'Oeuvre Militaire (MOM) .
Cette fortification de circonstance, peu standardisée, plus ou moins planifiée et homogène, est caractérisée par une épaisseur de béton plus faible (rarement au-delà de la
protection 1), l'absence d'armement spécialisé - on utilise l'armement pourvu par les unités combattantes -, un équipement restreint avec au mieux une ventilation manuelle, et enfin des cuirassements - cloches ou créneaux - de type disparate. Là où les constructions CORF sont occupées par du personnel spécialisé de forteresse, entrainé à cela et affecté à demeure, les blockhaus MOM ne sont occupés par des troupes d'intervalle en principe qu'en cas de conflit.
Page n° 1000581 mise à jour le 24/09/2022 -
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